Plus il est proche, moins on le voit…
(le danger)
Par Yves Allard

Métier; agriculteur… donc, on coure le risque de s’infliger l’une des 8000 blessures que subissent chaque année les agriculteurs à travers le Canada. Parmi celles-ci, on compte de 1500 à 3000 blessures graves (tel l’amputation d’un membre), et sur ce lot, plus d’une centaine de décès. En 2006 seulement, 13 801 exploitations agricoles ont déclaré au moins un accident avec blessures ayant nécessité un traitement médical ou un arrêt de travail, signale Statistique Canada. On est tellement plus en sécurité chez nous… pas vrai?



Ces jours-ci, c’est à peu près la semaine « sécurité en agriculture »… je dis à peu près, car l’ACSA nous propose « la semaine canadienne de la sécurité agricole » du 14 au 20 mars, mais, du 10 au 17 mars, L’UPA nous propose « la semaine de prévention et de sécurité à la ferme ». Tandis que, toujours du 10 au 17, la CSST nous propose « la semaine de la santé et sécurité en agriculture ». C’est presque la même chose, mais c’est pas tout à fait pareil ni en même temps… faudrait peut-être vérifier ça les gars! (rires) Le thème de cette année, « LA PRÉVENTION À LA FERME: JE M’Y ENGAGE! ».

Bon, je ne sais pas pour vous, mais comme bien d’autres thèmes du genre, celui-ci ne m’interpelle pas beaucoup… me semble qu’on pourrait trouver des thèmes plus évocateurs comme « Un pied de plus dans mon champs, c’est pas grand-chose… mais au bout de ma cheville, je le trouvais vraiment pratique »… ou encore « le mélange des bottes à caps d’acier, de l’eau, et de l’électricité… Ça chatouille pas longtemps, mais ça chatouille en calvasse! » ou bien… Non, ok, j’arrête… ils ont peut-être de meilleurs thèmes que les miens finalement. Mais l’important c’est de rappeler qu’aujourd’hui, sur les fermes, il faut plus que jamais penser « sécurité ».


Selon certains, un des problèmes avec la sécurité en milieu agricole, c’est que les gens travaillent « chez eux »… Et puisque, par défaut, on se sent habituellement plus en sécurité chez nous, on fait moins attention à certains détails qui peuvent facilement devenir source de danger. On s’habitue à une routine, et on se croit en contrôle… on est chez nous, y’en a pas de problèmes!

Le stress et la fatigue sont également des facteurs importants lorsque l’on parle de blessures qui auraient pu être évitées. On est dans une sorte de « zone confort » et on devient moins vigilant, pas vrai? Ça ne vous est jamais arrivé de pousser sur un objet en mouvement avec votre pied au lieu d’aller chercher une pelle par exemple? « La pelle est trop loin… je vais juste donner un petit coup et me tasser rapidement… » C’est vrai, ça marche d’habitude! Mais si une seule fois un faux mouvement du genre vous coûte un pied, vous allez trouver votre pelle pas mal plus loin à aller chercher à l’avenir…

De plus, environ 30% de ces blessures sont subies par des enfants. En milieu urbain, la proximité d’un éventuel danger semble probablement plus évidente… Mais des tonnes d’acier sur roues, il y en a pas juste en ville! À ce sujet, un ami agriculteur me racontait qu’il avait expliqué à son employé que s’il n’arrivait pas à discerner les rayons sur les roues de l’auto de ce dernier lorsqu’il entrait dans la cour, il allait le congédier… Ça peut sembler radical, mais vous évaluez à combien la vie de vos enfants? Et avec la machinerie lourde, c’est encore pire. 4 ou 5 km/h de plus peuvent facilement signifier quelques mètres de trop pour immobiliser un tel engin. C’est sûr, c’est de la production, et il faut que ça roule… mais la santé des individus qui nous entourent vaut bien un petit 10 minutes d’ « overtime » de temps en temps si nécessaire, non?

M. Alain Beaudin (Commissaire agricole) me disait que nous avons trop souvent affaire à des individus d’aujourd’hui, avec un plan de match d’hier, et une technologie de demain… bien dit, non? On a nos vieilles habitudes, on doit prendre en considération ce qui se passe en 2010, et on utilise la technologie de demain que l’on ne maitrise malheureusement pas toujours à 100%.

Et pour ceux qui ont à travailler avec des animaux, il ne faut jamais oublier que les animaux sont… des animaux! Ils peuvent avoir des réactions inattendues et il ne faut jamais prendre pour acquis qu’ils feront toujours exactement ce qu’ils font « d’habitude ».


« Pour rendre une ferme plus sûre, on peut changer l’équipement et l’organisation du travail. Utiliser d’autres matières. Modifier les processus ou les méthodes de travail. Ou encore resserrer les règles de sécurité au travail. Malheureusement, personne ne peut annuler après coup les conséquences dévastatrices d’un accident ».

Un simple petit conseil au niveau de la prévention; prenez le temps de plier les genoux lorsque vous soulever une charge. Ça peut sembler anodin, mais si vous saviez le nombre de dos qui sont endommagés et qui deviennent source de douleurs constantes suite à de la simple négligence… Et si jamais vous vous blessez au dos, consulter un médecin et voyez-y… vous éviterez peut-être ainsi des dommages irréversibles.


En agriculture, la machinerie est importante… mais n’oubliez jamais que l’être humain n’en fait pas parti… avec tout ce que ça implique, pour le meilleur, et pour le pire…


Texte complet d’où provient la photo en couverture : http://www.lacoop.coop/cooperateur/articles/2007/09/p28.asp

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