C’est toujours mieux en paires…

par Yves Allard

19 février 2010 - Je tape sur Google le mot « agriculteur » et je vois tout à coup défiler, au bas de la petite case, des suggestions de thèmes débutant avec ce mot. Mon attention se porte bizarrement sur la suggestion « agriculteurs célibataires » (je dis « bizarrement », car je ne suis ni agriculteur, ni célibataire… ça doit être la St-Valentin qui m’a affectée!)… Je clique, et découvre que la proportion de célibataires augmente beaucoup plus vite chez les agriculteurs québécois que dans le reste de la population de la province… Est-ce que ce phénomène pourrait faire partie des raisons pour lesquelles nous constatons une diminution de la relève depuis les dernières décennies? J’suis curieux… je décide donc de diriger mes recherches dans cette direction improvisée…

Dans les années 50, le Québec comptait plus de 150 000 fermes. Les familles étaient nombreuses et tous et chacun participaient aux tâches quotidiennes. Aujourd'hui, il reste cinq fois moins de fermes, soit environ 30 000, dont plusieurs dirigées par des hommes seuls. Presque un agriculteur québécois sur cinq est célibataire… c'est deux fois plus qu'il y a 30 ans! Enjeux s’est même penché sur la question et a rencontré de jeunes agriculteurs (âgés de 22 à 31 ans) afin d’en apprendre un peu plus…

Voyons le cas d’un certain Yves (j’ai choisi celui avec le prénom le plus évocateur)… En 10 ans, il a eu 11 petites amies, mais aucune n'est restée. Les longues heures de travail et les responsabilités de la ferme en découragent plus d'une: «On est samedi matin, il fait beau et ta copine te dit: "Est-ce qu'on va au chalet avec les autres, on va faire du ski nautique, on va aller à la plage, etc." et tu réponds "Je ne peux pas, ils annoncent quatre jours de beau temps." [...] Ça commence à casser là, mettons». Afin d’éviter le découragement prématuré d’une éventuelle conjointe, quelqu’un suggérait d’engager occasionnellement un employé pour effectuer différentes tâches. Il précise « occasionnellement », car dans bien des cas, un employé régulier finirait par affecter la rentabilité de l’entreprise. Mais même si ce n’est pas sur une base régulière, je serais porté à croire que de pouvoir s’évader et profiter d’un beau weekend ensoleillé de temps à autres peut alléger la charge sur les épaules d’un couple…

Selon les statistiques, le salaire moyen d’un agriculteur est de 16,000 par année… Bon , ok... ce n’est rien pour aider… mais il ne faut pas oublier que ce chiffre ne représente que le salaire, et ne tient pas compte des valeurs mobilières et immobilières que possèdent ces derniers qui, bien souvent, valent de petites fortunes. Bien des gens de la ville, eux, ont une belle grosse hypothèque, un prêt pour l’automobile, des meubles qu’ils payeront en 1463 versements faciles de $2.56 par mois, la balance du dernier voyage à Santa Banana encore en souffrance sur une carte de crédit, et commencent à penser à vendre leur maison pour avoir une chance de « revenir à zéro »… finalement, si l’on ne parle que d’argent, je penserais que les agriculteurs ont l’avantage, non?

Chez les jeunes producteurs agricoles, le nombre de célibataires a presque triplé en moins de 30 ans. Ils sont passés de 12 % qu’ils étaient en 1971, à plus 35 % au cours du nouveau millénaire. Une augmentation deux fois plus rapide que la moyenne des jeunes Québécois. Quant au nombre de jeunes agriculteurs, célibataires ou non, ils ne sont plus qu’environ 6000, alors qu'ils étaient 13 475 en 1991. Parmi ceux qui restent, plusieurs s'attendent à travailler sans relâche comme le faisaient leurs parents, tandis que d'autres cherchent d’autres avenues. Saviez-vous que lors d’un sondage réalisé auprès des jeunes producteurs, plus de 95% des agriculteurs ont répondu que leur profession était un obstacle aux rencontres amoureuses?

Pour aider les jeunes agriculteurs à trouver l’amour, certains sites web ont été créés comme agrirencontre.com ou encore rencontre-agriculteur.com… selon ce que j’ai lu, ça semble une alternative intéressante aux moyens de rencontre traditionnels. Je n’ai pas de données exactes sur le taux de réussite, mais je sais que ça a fonctionné pour plusieurs. Ça peut sembler moins romantique qu’une rencontre inattendue lors d’une promenade au bord de l’eau, mais la vie étant ce qu’elle est aujourd’hui, ça vaut peut-être la peine de s’y arrêter. De plus, ça facilite grandement la première approche… si vous êtes de ces personnes pour qui la gêne est souvent un obstacle, vous constaterez que c’est beaucoup plus facile d’entrer en contact avec quelqu’un de cette façon. Et, soit dit en passant, si c’était moi, je ne me limiterais pas aux sites de rencontre « pour agriculteurs »… il doit sûrement y avoir des filles sur des réseaux « réguliers » qui cherchent quelqu’un comme vous!

Un petit conseil lors de vos éventuelles correspondances, faites attention à  l’orthographe! Oui, bien des gens négligent cet aspect, et la perception de la personne qui reçoit un message bourré de fautes peu influencer son intérêt à votre égard… Je connais personnellement quelqu’un qui corrigeait les textes d’un gars qui se « magasinait » une copine sur internet, et parait-il que ce dernier s’est mis à avoir beaucoup plus de « retours » après le début de cette procédure. Bon, ok… vous allez me dire que c’est une forme de tricherie, et je ne peux vous contredire… sauf que ça reste le même gars, avec les mêmes valeurs, la même gueule, et les mêmes qualités…. Et je me dis… au grands « mots » les grands moyens!.

Si vous êtes agriculteur et à la recherche d’une conjointe, je ne m’inquièterais pas plus que si je pratiquais certains autres métiers. De plus, je suis certain qu’il y a bien des filles qui ne « trippent » pas sur la vie en ville! Par contre, si vous cherchez une « associée » capable de vous accompagner dans toutes vos tâches quotidienne, il se peut que ce soit effectivement un peu plus difficile à trouver… et si vous rencontriez une personne qui a un boulot ailleurs et que son salaire vous permettait de vous payer une paire de bras supplémentaire à la ferme, vous seriez prêt à accepter cette formule?

Dans certains cas, il faut peut-être simplement commencer à voir la vie à la ferme d’un œil différent, ne pas se limiter à la traditionnelle vie de couple du milieu et s’adapter à une nouvelle réalité… qu’en pensez-vous?

Que l’on soit camionneur, agriculteur, exobiologiste, clown, ou représentant pour une compagnie de bouffe pour chat dans le quartier chinois, trouver l’amour peut parfois être aussi ardu que de chercher une aiguille dans une botte de foin… mais courez le risque et faites quelques pas en avant… elle pourrait bien être plus facile à trouver qu’on pourrait le croire… ;o)

P.S. je sais… dans ce texte, j’ai parlé uniquement des gars de la terre qui cherchent une conjointe, et non le contraire… c’est juste qu’à la suite de mes brèves recherches, l’inverse ne semble pas inquiéter ces dames…

 

Copyright © 2008-2010
LE MONDE AGRICOLE.CA
Tous droits réservés.