PROJET D’ACCORD SUR LE COMMERCE INTÉRIEUR :
Un enjeu fondamental interpellant l'ensemble des consommateurs québécois

Tiré du site Internet de l'UPA

Québec, 9 juillet 2008 - La nouvelle version des dispositions agricoles (chapitre 9) de l’Accord sur le commerce intérieur (ACI), actuellement à l’étude dans le cadre de la Conférence annuelle des ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux de l’Agriculture (Québec – 9, 10 et 11 juillet), soulève de vives inquiétudes au sein de l’Union des producteurs agricoles (UPA), de la Fédération des producteurs de lait du Québec (FPLQ) et de l’Association coopérative d’économie familiale de Québec (ACEF Québec). « Selon ce qui nous a été présenté, le Québec perdrait la capacité d’exercer son plein pouvoir de réglementer l’étiquetage et la composition des aliments. Il mettrait aussi en péril toutes les mesures favorisant la mise en marché collective et la gestion de l’offre des produits agricoles sur son territoire », a déclaré le président de l’UPA, M. Christian Lacasse.

En vertu du nouveau projet d’Accord, une province ou une entreprise souhaitant commercialiser ses produits dans une autre province pourrait dorénavant se plaindre à l’ACI dès qu’une mesure provinciale ou fédérale régissant l’étiquetage ou la composition des aliments lui engendre un coût additionnel ou donne l’impression d’entraver ou de restreindre les occasions de commerce. La partie plaignante n’aurait pas à soumettre une analyse économique complète en appui à sa plainte – tout le fardeau de la preuve incomberait au gouvernement visé, à qui il appartiendrait de faire la démonstration que cette mesure est légitime.

« De telles mesures visent prioritairement à protéger les consommateurs et à leur garantir une information juste et complète sur les produits qu’ils consomment. Or, le soin de trancher sur la légitimité des lois et règlements de l’Assemblée nationale ou du gouvernement du Québec appartiendrait désormais à un panel de l’ACI constitué de non-élus. Voilà un enjeu fondamental interpellant non seulement les agriculteurs, mais aussi l’ensemble des citoyens du Québec », a pour sa part ajouté le président de la FPLQ, M. Marcel Groleau.

À titre d’exemple, une entreprise pourrait contester le fait qu’il est interdit, au Québec, de retirer de la protéine du lait avant de l’embouteiller. Une partie pourrait également contester le fait qu’il est interdit, au Québec, d’utiliser un terme laitier (fromage, lait, crème, cheddar ou mozzarella) ou des images de vaches ou de ferme laitières pour vendre un succédané, par exemple des tranches, boissons ou desserts glacés à base de soya. L’approvisionnement prioritaire des abattoirs québécois en porcs du Québec, tel que le prévoit la nouvelle convention conclue récemment, pourrait aussi être contesté, en faisant valoir qu’il s’agit d’une entrave au commerce interprovincial.

Les exemptions ministérielles dans les fruits et légumes, comme par exemple de réserver aux pommes du Québec l’accès aux entrepôts à atmosphère contrôlée de la province au pic de la récolte pour éviter le gaspillage, pourraient être contestées de la même façon. Tout comme les systèmes québécois de traçabilité, la procédure d’inspection et de classement dans le sirop, les normes de composition des yogourts, la certification québécoise des produits bio, etc. La liste est longue et montre toute l’étendue du danger qui pèse sur les normes d’étiquetage et de composition des produits, la mise en marché collective et la gestion de l’offre.

Selon M. Denis Falardeau de l’ACEF Québec, « le fait de risquer de perdre notre capacité à réglementer dans le domaine de l'agroalimentaire représente non seulement une menace à notre autonomie alimentaire, mais aussi l'impossibilité pour l'avenir d'innover en matière de protection et de promotion du droit de tout citoyen québécois à avoir une alimentation conforme aux normes découlant du choix de société que le Québec a déterminé. L'intérêt public doit toujours primer sur l'intérêt privé ».

Pour les présidents de l’UPA et de la FPLQ, la nouvelle version de l’Accord est d’autant plus inacceptable qu’elle va à l’opposé des efforts entrepris collectivement pour procurer un caractère distinctif à notre agriculture et à nos produits, comme le souhaitent les consommateurs québécois, à commencer par le récent plan de valorisation Le Québec dans votre assiette mis de l’avant par le ministre québécois de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation, M. Laurent Lessard. Le projet d’Accord contredit également la stratégie de souveraineté alimentaire, appelée par les agriculteurs du Québec et plusieurs dizaines d’organisations de la société québécoise. Par ailleurs, il serait paradoxal de voir le gouvernement du Québec défendre, sur la scène internationale dans le cadre des négociations actuelles à l’OMC, la mise en marché collective et la gestion de l’offre tout en tolérant, sur son propre territoire, un accord commercial menaçant l’existence de ces mêmes concepts.

« Nous avons sensibilisé le gouvernement du Québec aux dangers réels que suppose le projet. Québec partage nos préoccupations et convient que des changements sont absolument nécessaires afin de maintenir sa compétence constitutionnelle de réglementer le commerce local, au regard notamment de la protection des consommateurs et de l’organisation collective des agriculteurs et des agricultrices », ont continué Messieurs Lacasse et Groleau.

Les deux présidents ont toutefois rappelé que le ministre Laurent Lessard aura fort à faire durant la Conférence, car il trouvera devant lui plusieurs provinces qui, en faveur d’une plus grande libéralisation des marchés, ne manqueront pas de lui rappeler que le Québec a fait une priorité du renouvellement de cette entente. Le ministre québécois de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation devra se rappeler qu’il a derrière lui le front uni des agriculteurs et des agricultrices du Québec, qui s’en remettent aux engagements de son gouvernement en faveur de nos outils collectifs de mise en marché.

Source : Union des producteurs agricoles

Copyright © 2008
LE MONDE AGRICOLE.CA
Tous droits réservés.